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  Editorial - 28 novembre 2011  
   

Ce mois-ci, les Archives françaises du film du CNC invitent à un voyage dans le temps grâce à l'histoire du cinéma. La thématique constituée autour de la représentation de la préhistoire au cinéma permet à la fois un retour aux origines de l'art et d'appréhender les différents dispositifs « inventés » par le cinéma pour en rendre compte, comme celui de la technologie numérique 3D sollicité par Werner Herzog pour sa visite de la grotte Chauvet. C'est cette expérimentation technologique que l'on retrouve également à l'oeuvre dans le parcours consacré à Etienne-Jules Marey, expérimentation matrice de l'aventure cinématographique alors à ses prémices.

Nous avons aussi le plaisir de vous signaler une nouvelle rubrique sur le site des Archives qui sera amenée à s'étoffer au fil des mois avec la constitution d'un catalogue des films issus des collections programmés dans les différentes institutions et festivals. Une occasion pour les programmateurs de découvrir de nouvelles restaurations, un outil aussi pour les Archives afin d'explorer plus profondément ses collections et proposer d'autres oeuvres à exposer sur les écrans ouverts au patrimoine.

Béatrice de Pastre - Directrice des collections des Archives françaises du film - CNC

 
 

"La vie d'un film à Bois d'Arcy"
15 - "Au film, les pompiers..."

 
Pierre-Etienne Letrun et Joseph Mouradian

Pierre-Etienne Letrun et Joseph Mouradian
© CNC

 
Résumé des épisodes précédents : les boîtes de film sont donc réceptionnées, testées et conservées au sein de la batterie militaire de Bois d’Arcy. Les films qu'elles contiennent sont inventoriés, indexés, souvent restaurés, visionnés, décrits par les agents des Archives françaises du film du CNC et les consultants extérieurs. Tout ceci se déroule sous l'oeil vigilant du département Hygiène sécurité environnement (HSE), au sein du service (HSEM) dirigé par Patrick Khafif qui mène également toutes les actions de maintenance du site.
Pierre-Etienne Letrun et Joseph Mouradian veillent à la sécurité des biens et des personnes présents sur le site. Tout nouvel arrivant est informé des consignes de sécurité et des formations sont régulièrement dispensées au personnel. Pierre-Etienne explique : « Les risques auxquels sont soumis les personnes diffèrent selon leur poste de travail et nous leur fournissons l’équipement approprié pour assurer leur sécurité : il sera différent pour les agents travaillant dans les stocks ou pour ceux du laboratoire et, même là, les risques encourus ne sont pas les mêmes selon que l’agent manipule ou non des produits chimiques entrant dans la composition des bains de développement... Mais, à tous, nous rappelons les consignes d’évacuation ! » A cet effet, des exercices d’alerte ont lieu tous les trimestres et, une fois par an, les pompiers sont sollicités. « Au début, c’étaient de simples exercices incendies permettant d’entraîner le personnel et de tester nos procédures. A présent, nous étudions différents scénarios avec, par exemple, l’entrée principale bloquée » sourit Joseph. Pierre-Etienne ajoute : « Le site est très complexe : c’est un lieu ancien avec un seul accès et les risques qu’il recèle balayent différentes thématiques de sécurité : les recenser toutes fut un énorme travail, mais c'est passionnant ! »
 
Pierre-Etienne Letrun

Pierre-Etienne Letrun © CNC

 
Tout comme leur chef de service, Patrick Khafif, et le responsable de la maintenance au laboratoire, Benoît Furdygiel, Joseph et Pierre-Etienne assurent les astreintes. L’hiver dernier a été rude pour les installations, et pour eux aussi par la même occasion, comme le rappelle Pierre-Etienne : « Une coupure EDF nous oblige à venir en urgence pour relancer les machines. Lors de l’arrêt de la chaudière, cet hiver, nous avons dû purger l’ensemble du réseau pour éviter le gel : une belle galère qui nous a pris plus de quatre heures durant la nuit ! » Joseph se souvient : « C’était magnifique, on se serait cru aux sports d’hiver avec toute cette neige... mais les camions de nos prestataires sont restés bloqués 72h chez nous ! »
 
Joseph Mouradian

Joseph Mouradian © CNC

 
Pierre-Etienne et Joseph veillent sur les personnes mais aussi sur l’environnement et au respect des réglementations notamment des arrêtés préfectoraux. « Depuis notre arrivée, il y a trois ans environ, nous avons entrepris d’analyser les situations à risques afin de rédiger le Document Unique d’évaluation des risques professionnels. Aujourd’hui, nous mettons en place avec le SRH (service des ressources humaines) un plan de formation HSE pour tout le personnel. » Pierre-Etienne confie : « C’est encourageant de voir que nous arrivons à sensibiliser les agents et qu’ils sont réceptifs à nos recommandations, même si certains sont encore un peu réfractaires. Jusqu’à présent, ils avaient tendance à ne se préoccuper que du film et pas assez d’eux-mêmes. Pour moi, il s’agit d’un objet potentiellement dangereux, surtout le film nitrate qui s’enflamme et qui peut dégager des vapeurs toxiques. » Et Joseph de conclure : « Nous, notre rôle est de protéger les gens qui protègent le patrimoine cinématographique... »
 
 

Parcours découverte Etienne-Jules Marey

 
Portrait d'Etienne-Jules Marey

Portrait d'Etienne-Jules Marey, 1888, d'après plaque de verre négative
© Collection CNC-AFF

 

Parmi leur collection de films enregistrant les premières tentatives de mise en mouvement des images, les Archives françaises du film du CNC conservent environ 150 chronophotographies d'Etienne-Jules Marey (1830-1904). La majeure partie de cet ensemble a été restaurée, permettant ainsi d'en mesurer l'apport incontournable à l'histoire du cinéma.
Le parcours découverte Etienne-Jules Marey revient sur les images de ce scientifique qui firent de lui un précurseur du cinéma et aborde la problématique de la restauration et de la diffusion de ces chronophotographies, illustrée par cinq bandes restaurées par les Archives françaises du film du CNC. L'ensemble des films restaurés par le CNC est consultable sur le site de Bois d'Arcy, 63 d'entre eux ont été numérisés et peuvent être visionnés sur les postes du CNC à la BnF (Paris).

Accès au parcours découverte

 
 

Préhistoire au cinéma

 
La Préhistoire du cinéma

La Préhistoire du cinéma, Marc Azéma

 

Il est rare que l'actualité de l'édition et des sorties cinématographiques entrent en résonnance avec le calendrier des commémorations nationales. Pourtant, cet automne, la parution de l'ouvrage de Marc Azéma La Préhistoire du cinéma et la sortie en salle du documentaire de Werner Herzog La Grotte des rêves perdus viennent en quelque sorte saluer le cinquantième anniversaire de la mort d'Henri Breuil (dit l'Abbé Breuil, 1877-1961) et le centenaire d'André Leroi-Gourhan (1911-1986). L'un, formé aux idées évolutionnistes encore peu répandues, orienta sa réflexion vers l'étude de la préhistoire qui en était alors en cette fin du XIXe siècle à ses balbutiements.
La découverte en 1901 des grottes de Font de Gaume et des Combarelles aux côtés de Denis Peyrony attachèrent son esprit curieux à l'étude de l'art pariétal. Il est ainsi l'auteur de la première description de la grotte de Lascaux.
L'autre, après des études de langues orientales, participa à la rénovation du Musée d'ethnographie du Trocadéro en Musée de l'Homme où il commença à travailler en 1933. Reprenant, en 1956, la chaire de Marcel Griaule à la Sorbonne, il porte un nouveau regard sur l'art pariétal paléolithique. S'attachant à l'étude des documents eux-mêmes, à leur place dans la topographie des grottes et des abris et procédant à des relevés statistiques des représentations, il put conclure au caractère religieux de ces sanctuaires des temps anciens.
L'ouvrage de Marc Azéma montre que, loin d'être un art figé dans les parois rocheuses qui lui servent de support, l'art pariétal est un art du mouvement dont les personnages mis en scène courent, se battent, bondissent. Et l'usage de l'expression « mise en scène » n'est pas ici un abus de langage. L'évocation du dispositif spectaculaire de la grotte de Cougnac (Lot) est ici exemplaire. La frise de mégacéros couchée sur la paroi calcaire doit être regardée entre les deux piliers constitués par la réunion d'une stalactite et d'une stalagmite rehaussés de traces d'ocre rouge. Entre l'écran de calcaire et ce véritable rideau de scène entrouvert, une stalagmite sectionnée sert de piédestal pour une lampe. L'ondulation de la flamme livrée au courant d'air de la caverne, la fumée dégagée par la combustion des lichens et de la graisse animale sont les « autres » accessoires nécessaires à l'animation de cette procession majestueuse. Les fantasmagories de Robertson reprirent, au XVIIe siècle, certaines composantes de ce dispositif.

 
[Les Eyzies-de-Tayac]

[Les Eyzies-de-Tayac] © Collection CNC-AFF

 

La caméra 3D de Werner Herzog révèle les richesses du véritable sanctuaire que renferme la grotte Chauvet (Ardèche). Trouvant peut-être ici sa justification esthétique et conceptuelle, la technologie tridimensionnelle sollicitée par le documentariste témoigne de l'intelligence et de la technicité des Aurignaciens qui surent allier relief, trait, support et surface dans l'élaboration d'un véritable poème visuel animé. Herzog, saisi par le caractère mystique du lieu, rejoint les analyses scientifiques de Leroi-Gourhan faisant pénétrer l'un et l'autre dans le monde à jamais mystérieux de ces hommes qui maitrisaient déjà « Le grand art de la lumière et de l'ombre ». Laurent Mannoni, éd. Nathan, 1994.
Les Archives françaises du film ont apporté leur contribution à la réalisation du DVD qui accompagne l'ouvrage de Marc Azéma et proposent de découvrir quelques films issus de leurs collections qui témoignent de la fascination exercée par la préhistoire sur le cinéma documentaire.

Liste de films sur la préhistoire

 
 

Disparition de Paulette Dubost

 
Paulette Dubost dans La Règle du jeu de Jean Renoir © Éditions Montparnasse
 

Apparue pour la première fois chez Jean Renoir dans Nana, 1926, Paulette Dubost a organisé sa carrière en se moquant des modes, sans que les années n'aient eu de prise sur elle. Sans prétention, mais avec une voix reconnaissable entre toutes, elle a donné au cinéma français des dizaines de seconds rôles marquants, de la Petite sauvage de Jean de Limur (1935) à Curriculum de Alexandre Moix (2007), en passant par La Règle du jeu de Jean Renoir (1939) ou Le Déjeuner sur l'herbe (1959). On la retrouve également dans plusieurs films de Berthomieu, Le Plaisir (1951) et Lola Montès (1955) de Max Ophuls et La Fête à Henriette de Julien Duvivier (1952). Pétillante et toujours pleine d'allégresse, elle savait jouer la comédie, danser, chanter, au cinéma ou au théâtre, mais aussi à la télévision et au Music-Hall. Elle doit sa longévité et son succès à son charme et à son jeu nuancé sans vulgarité ni maladresse. Cette aisance lui permit d'endosser une grande variété de personnages, le plus souvent des seconds rôles, mais qui, tous, marquèrent spectateurs et critiques. Lorsqu'elle interprète le rôle principal de Bécassine pour Pierre Caron en 1939, elle se lance dans l'aventure, avec sa coiffe, ne craignant ni le vent, ni les critiques des Bretons.

 
Bécassine © Editions René Chateau
 

Bécassine fut très longtemps regardée comme une oeuvre ringarde... Restaurée par les Archives françaises du film, on peut la revisiter aujourd'hui et y trouver le charme désuet des comédies loufoques et excentriques des années 1930, recouvrant en même temps un intérêt sociologique évident. En 1995, Paulette Dubost, alors vice doyenne des actrices françaises, est venue raconter, avec humour et insolence, les déboires du tournage, à l'occasion d'une programmation de Cinémémoire, après avoir revu le film pour la première fois. En 2010, elle avait fêté ses 100 ans au Théâtre de Longjumeau (Essonne).

 
 

Film en quête d'identification

 
film indéterminé

Film indéterminé © DR, collection CNC-AFF

La mise en ligne de photogrammes issus de films non identifiés se poursuit, encouragée par quelques résultats prometteurs. Après l’identification définitive du film From Horse Car to Subway in New York City, (lettre n°18 - avril 2011) une nouvelle information concernant l’un des films qui inauguraient cette rubrique (lettre 13 - janvier 2010), nous a été transmise. Ce film, un burlesque américain dont la copie conservée aux Archives françaises du film a été tirée vers 1923, serait interprété par George Ovey. En effet, il apparaît sur la première vignette dans le costume caractéristique de son personnage, Jerry. C’était un habitué des Cub Comedies vers 1915-1917...
Les photogrammes mis en ligne aujourd’hui concernent un film au titre indéterminé, d’origine imprécise (allemand ? italien ? version italienne d’un film allemand ?) dont l’élément déposé est d’une durée de 7mn. La copie a été datée, par nos services, de 1908. Le film met en scène deux enfants, amis, mais qui, en grandissant, deviennent l'un braconnier, l'autre garde-chasse. Ils s'opposent jusqu'au jour où celui devenu braconnier vient en aide à celui devenu garde-chasse, frappé en pleine forêt par la chute d'un arbre. Sauvetage qui leur permet de se réconcilier...

Film en quête d'identification

 
 

Films restaurés par les AFF-CNC projetés dans le cadre de la diffusion culturelle

 
La Main
La Main © Collection CNC-AFF
 

De nombreux films restaurés par les Archives françaises du film du CNC sont programmés en cette fin d'année !
L'hommage rendu à Jean Rouch dans le cadre du festival Doclisboa puis à la Cinemateca portuguesa s'est poursuivi tout le mois de novembre. Le festival international d'Arras a programmé Patriotisme ? de Georges Jaffé et le 10e festival du film de Compiègne a projeté Jeux interdits, de René Clément, ainsi que Le Soldat Laforêt, de Guy Cavagnac, ce dernier film provenant des collections de la Cinémathèque de Toulouse. Les Archives participent également au focus sur le cinéma ethnographique et à la 13e édition du festival Extrême cinéma à la Cinémathèque de Toulouse. A la fin du mois, débute un cycle sur le cinéma fantastique à l'Institut français de Naples avec la présentation de La Main, d'Edouard-Emile Violet, et de La Septième porte d'André Zwobada.
En décembre s'ouvre un cycle Jean Grémillon à la Cinémathèque suisse. Les Archives françaises du film du CNC rendent hommage aux actrices des années 1920 au Lux de Valence. L'institut Jean Vigo programme Campement 13, de Jacques Constant. Décembre, c'est aussi le rendez-vous de l'animation avec les sommets de Montréal (Canada) où le fantastique sera à l'honneur. Deux films sur Tlemcen seront programmés au Centre culturel français de Tlemcen (Algérie). Enfin, les Archives françaises du film participeront, le 21 décembre, à la toute première fête du court métrage : le Jour le plus court !

 


Programmation en cours sur le site des AFF

 
 

Crédits

 

Textes : Béatrice de Pastre, Sophie Le Tétour, Eric Le Roy & Magali Gourret
Iconographie et photos : Magali Gourret
Remerciements à Catherine Decayeux, Sophie Le Tétour, Pierre-Etienne Letrun & Joseph Mouradian
Relecture et corrections : Jean-Marie Manant & Dominique Moustacchi
Coordination technique et mise en ligne : Driss Tsila

 

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